LUXEMBOURG – Si la plupart gagnent très bien leur vie, le cliché de l’avocat richissime est parfois mis à mal au Luxembourg.
Valérie Dupong, ancienne bâtonnière du barreau de Luxembourg.
Tous les avocats au Grand-Duché ne roulent pas sur l’or. Pour tenter de cerner le problème et mettre fin aux rumeurs, le Barreau de Luxembourg a lancé en 2021, une enquête sur le bien-être de ses inscrits. Environ 1 100 des 3 100 avocats ont répondu au questionnaire. Sans doute aussi les plus concernés par d’éventuels soucis.
Reste que près de 20% des répondants ont révélé «avoir des difficultés à payer leurs dépenses professionnelles et privées, note l’ancienne bâtonnière, Valérie Dupong. La faute à des revenus insuffisants ou irréguliers», qui engendrent des difficultés pour régler par exemple le loyer, les cotisations sociales, les avances d’impôts, la TVA.
«La plupart des avocats sont très bien payés et gagnent très correctement leur vie, précise Valérie Dupong, mais certains peinent à vivre de leur métier. Nous avons un pourcentage de nos confrères, notamment des jeunes avocats et de petites structures, sans réserves financières, qui ont beaucoup souffert de la crise du Covid-19. Beaucoup ont du mal à s’établir», ajoute-t-elle.
Le barreau de Luxembourg réunit à ce jour 3 225 inscrits et celui de Diekirch 54. Il y a en général quatre nouvelles promotions par an. La dernière assermentation a réuni 117 avocats et la précédente un record de 159. Depuis dix ans, le Barreau de Luxembourg progresse d’environ 5,3% par an avec un pic à 9,8% en 2018. Une croissance plus rapide que celle de la population du pays, notamment liée au développement de la place financière, car le contentieux est plutôt stable.
Les douze premiers cabinets actifs dans le secteur des affaires réunissent 1 000 à 1 300 avocats. Beaucoup œuvrent dans le conseil juridique. Et les cabinets d’affaires admettent régulièrement avoir du mal à recruter. Des secteurs comme la compliance RGPD, l’intelligence artificielle, les nouvelles technologies génèrent une grosse demande. Les affaires au tribunal augmentent, elles, mais davantage en proportion de la population.
C’est l’une des raisons pour lesquelles le barreau vient de lancer une cellule d’écoute pour aider les avocats. «Le bâtonnier est informé des procédures ou assignations contre un avocat, par exemple pour des raisons bancaires, de sécurité sociale, de TVA. «Nous avons réalisé qu’il y a de plus en plus de procédures contre des avocats qui n’arrivent plus à payer des factures», note Valérie Dupong.
«Pour rassurer ses jeunes et que les choses soient claires», le Barreau a par ailleurs envoyé une circulaire pour s’assurer que les avocats non-salariés reçoivent au moins le salaire minimum qualifié, «car nous avons eu des échos que ce n’était pas toujours le cas», poursuit l’ancienne bâtonnière. «Nous encourageons les gens à venir nous voir quand les difficultés commencent et à ne pas attendre», ajoute le bâtonnat. Car entre des problèmes de gestion, dépression, problèmes personnels, les causes peuvent être diverses. Mais difficile de chiffrer le phénomène notamment car «nous n’avons pas de statistiques sur les raisons des démissions»
Et la crise de l’énergie ne va rien arranger. «Nous avons discuté du sujet avec d’autres barreaux (Allemagne, Pays-Bas, Suisse, Autriche) et nous savons que cela va frapper durement nos jeunes et les petits cabinets». Et notamment ceux qui viennent de s’installer et ont des dettes.
Pour la journée européenne de l'avocat, des consultations gratuites sont offertes aujourd'hui (8h-19h) à la Cité judiciaire à Luxembourg (Cour supérieure de justice). Elles concernent les droits de la famille, de l’immigration, du travail et du bail à loyer. Se présenter spontanément.
Le barreau de Luxembourg réunit 46% de Français, 25% de Luxembourgeois, 13% de Belges et 4% d’Allemands. Pour y accéder beaucoup prennent, suite à des études de droit, un cours complémentaire sur les spécificités du droit luxembourgeois. S’ensuit un examen, deux ans de stage et un nouvel examen pour devenir avocat à la Cour.
La liste 2 réunit les stagiaires, la liste 3 les avocats honoraires et la liste 4, environ 550 avocats dits de la liste européenne, inscrits non comme avocats à la Cour mais assermentés en vertu du droit européen. La profession n’a pas de limite d’âge. Dans les affaires ils arrêtent souvent autour de 60 ans, dans le contentieux il n’est pas rare qu’ils continuent jusqu’à 70-75 ans
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